On continue ce petit voyage dans l'animation nippone avec un réalisateur que j'aimais particulièrement : Satoshi Kon.
En fait, j'avais préparé une sorte de "capsule" en son honneur pour diffuser à la radio, mais ma nullité en techniques de montage audio l'a rendue inaudible. Je vais tâcher de me rattraper aujourd'hui.
Si je me suis arrêté sur une œuvre particulière de Takahata, je serai bien incapable de faire de même pour Satoshi Kon. Le premier de ses films que j'ai vu, c'est le génial "Tokyo Godfathers". Un coup de foudre. Rétrospectivement, c'est bien d'avoir commencé par ce qui est son troisième film, il est très réussi tout en étant... "facile à regarder". Les graphismes et l'animation sont très chouettes (remarquez, tous les films de Satoshi Kon sont irréprochables de ces côtés là), les personnages sont hauts en couleurs, l'histoire est simple et efficace et enfin, la musique de Keiichi Suzuki (qui a bossé avec Kitano sur "Zatoichi") est la petite cerise que l'on apprécie toujours de trouver à sa place, sur le gâteau.
Certaines séries ou certains films placent des villes ou des lieux comme actrices / acteurs à part entière. C'est bien connu : "Friends" ou "How I met your mother" pour NY ou -pour faire vite- "Amélie Poulain" pour Paris (la liste est longue). La capitale japonaise est l'un des personnage du film de Kon, géographiquement et sociologiquement. "Géographiquement", je pense que tout le monde pige, pas de problème. Pour expliciter le côté "sociologique", je dois rentrer un peu dans le scénar du film. Grosso modo, "Tokyo Godfathers" raconte l'histoire de trois SDF, un homme ruiné, un travesti et une adolescente fugueuse, qui trouvent un bébé et une clé le soir de Noël. On suit leurs aventures pour retrouver la mère dudit bambin et on se plonge dans le quotidien singulier des SDF de Tokyo (on découvre les fameuses tentes carrées dans les parcs). Pour l'avoir vu en vrai, c'est exactement ça.
Un autre des aspects des films de Satoshi Kon, c'est la mise en scène des rêves et des troubles psychiques. Il a commencé dès son premier film, "Perfect Blue", et sa jeune chanteuse Mima, frappée de schizophrénie, il l'a approfondi dans "Paranoia Agent" -série hallucinée en 13 épisodes qui nous met en chasse du "gamin à la batte"- et on le retrouve dans son dernier film, "Paprika".
"Tokyo Godfathers" était un coup de foudre, mais "Paprika", on en tombe amoureux. Les aventures de cette ardente rousse, sorte de "Miss Hyde" d'une professeur toute sage, sont un pur régal.
Comme j'ai déjà été assez long dans ce post, je vais un peu abréger. "Paprika", il faut le voir. Ce rythme, cette héroïne aussi sexy que délurée, cet univers saupoudré de sortes de dimensions parallèles, cette fin à la Akira (Satoshi Kon a appris le métier de mangaka auprès du maître Ōtomo)... Et puis, cette musique. C'est Susumu Hirasawa, gourou de la "techno-punk", qui l'a signée. Hirasawa avait déjà bossé avec Satoshi Kon sur "Millenium actress" (on remonte un peu dans la frise chronologique, "Millenium actress" est le second film de Kon) et pour "Paprika", il signe une BO détonante, barrée, qui colle parfaitement au film.
« Je n'ai pas réussi à mourir ! »
Satoshi Kon a été emporté par un cancer du pancréas le 24 août dernier, à l'âge de 46 ans. Auteur hyper doué, talentueux et généreux (il a participé à la création de la Japan Animation Creators Association afin d'améliorer les conditions de travail des jeunes animateurs), il a signé une œuvre aussi captivante que singulière, qui nous plonge aussi facilement dans le Japon contemporain que dans un univers parallèle halluciné. Parfois, en même temps, d'ailleurs !
Pour ceux qui n'ont pas la larme facile, Satoshi Kon a demandé à sa femme de publier un récit où il raconte ses derniers mois de vie. Il y décrit sa maladie, son combat et son agonie, "à la japonaise", avec humilité, humour, altruisme mais aussi une inquiétude et une émotion "maîtrisées", sincères et immensément touchantes.
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